« Sans nos marins, t’es rien que de l’eau » Les Têtes Raides.
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Piqure de rappel avant d’attaquer dans le vif, nous vous
avions parlé de Serge, skipper rencontré à Lanzarote avec lequel nous pensions
franchement embarquer sur le cata en convoyage.
Manque de bol pour nous, l’homme qui était pourtant le
skipper parfait pour nous former n’embarque que des futurs postulant au titre
de capitaine 200 voile, faisant lui-même passer les examens de capitaine. C’est
pourquoi il se concentre uniquement sur ses futurs élèves, faisant de la
transat une pré-formation incluant le programme entier !!!! Autant dire que ça ne doit pas rigoler tous
les jours!
Beaucoup de ses récits nous ont tenus en haleine, j’en avais
noté quelques uns, en voici 2.
Le premier est plutôt rigolo, Serge ne loupe jamais un
premier de l’an, s’il est en mer tant mieux, il le fête dignement sur son
bateau. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé à croiser un ami au large un 31
décembre, qu’à cela ne tienne, l’un des deux bateau à été mis en remorque, tous
les occupants des deux bateaux se sont retrouvé sur le premier afin d’opérer
une java et un repas qui laisse rêveur…
Le second est plus impressionnant, lorsqu’on demande à Serge
s’il à déjà perdu un équipier à la mer (lui qui dit maitriser la manœuvre du
« MOB », man over board), il répond que son compte est positif.
C'est-à-dire qu’il n’en a jamais perdu mais en à repêché deux! Le premier en
suivant un bateau, il à vu qu’un mec était tombé de l’embarcation et l’a
repêché, normal… Le second est plus improbable, arrivé de transat, il découvre
avec son équipier, sans en être bien sûr tellement cela parait bizarre, une
tête qui sort de l’eau, sans aucun navire en vue, à plus de 7 milles des cotes,
30 minutes avant la tombée de la nuit… après repêchage, il s’avère que l’homme
était partit le matin même pour se suicider à la nage, mais avait rapidement
changé d’avis… l’à eu chaud!
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02/02/14…
… Sortie du canal, mouillage derrière la digue qui relie
Flamenco Island à Panama City…
Nous partons à l’assaut de cette grande ville (nous n’irons
pas loin). Sur les morceaux de tôle et de bois qui servent de ponton nous
débarquons de l’annexe et tombons sur un bonhomme à l’allure sympathique. Un
français, une cinquantaine d’année, la peau usée des marins, les yeux bleus et
la queue de cheval. Sans le savoir encore, nous sommes en présence de l’un de
ces marins que la mer porte d’escale en escale et qui laisse derrière lui un
nom dont on se souvient : Lydéric. Véritablement son nom résonne dans le
Pacifique, en toute modestie, c’est une icone de cet Océan.
Retenez le, on entendra parler de lui comme de Moitessier,
la légende est déjà en route, le personnage se cache, de plus en plus du monde
le cherche en quête d’enseignements ou d’histoires. Heureusement il vient de
céder, il naviguera prochainement avec
un couple d’amis qui souhaitent profiter du temps passé avec lui pour
coucher sur papier les aventures de Lydéric et en faire un livre.
J’espère que ce projet verra le jour car il protège son
anonymat, gardant précieusement secret l’emplacement de l’atoll qu’il occupe!
Nationnal Géographic a déjà fait un
reportage sur notre oiseau mais n’a pas respecté son vœu d’anonymat, ce qui l’a
retranché dans la méfiance envers les curieux. Voilà pourquoi je ne me permets
pas de publier son portrait ni de révéler ou se cache son paradis…
Ces aventures de marins l’ont mené en Polynésie ou il s’est
fait un nom, surtout aux Marquises. Là bas il est connu comme le loup blanc,
chasseur de bœufs et cochons sauvages (Puaka), expert apnéÏste et de temps à
autre « consultant maritime » pour les autorités. Notoriété grandissante il s’est mis en quête
d’une île déserte et il l’a trouvée! Un atoll loin de tout quasi inaccessible
pour les non initiés tant la passe d’entrée est dangereuse. En 6 années passées
là bas il quand même reçu trois voiliers dont un d’expédition scientifique (qui
n’est pas le Tara). Et si d’aventure trop de curieux débarquaient il s’est fait
une cabane de secours perchée dans les cocotiers sur une île un peu plus loin.
Lydéric tient à sa solitude! Même s’il l’avoue, chaque fois
qu’il croise des enfants en escale cela lui donne de plus en plus envie de
transmettre son savoir à une
progéniture… Cherche femme pour Robinson-Crusoade…
Son île fait quand même quelques kilomètres carrés, ponton,
cabane de sculpture, et un mur anti tsunami construit à main de 40m par 4 de
large et 1 de haut, constitué de coraux maintenus par des filets de pêche et
des pieux. Les coraux ont été récoltés
grâce à une barge qu’il s’est faite permettant de remonté les
« patates » par lots de 500kg! Il cultive, fume le poisson, chasse la
frégate et la tortue, entretien son parc à langouste duquel il tire 25kg par
semaine, pêche des poissons, dont les plus gros atteignent près de 80kg, qu’il tire au harpon en apnée jusqu’à
30m de fond (il doit faire mouche du premier coup en tuant sur le coup la bête
pour ne pas risquer de se faire emmener) et à subit plusieurs attaques de
requins. Tous les ans à la bonne saison il prend 3 mois pour faire le tour de
l’île afin de ramasser les œufs de sternes (qu’il conserve grâce à de la
paraffine) et les paquets de 2kg de cocaïne qui viennent s’échouer. Entre
navigations et repos sur l’île il ne doit regagner l’humanité qu’une fois tous
les deux ans pour remplir son bateau de vivres en conserve. Un quotidien bien remplit en somme… On
retrouve beaucoup de Moitessier dans ces récits de pêche, c’est d’ailleurs un
maitre pour lui.
Dans ces récit de navigation également, bien sur ses bateaux
sont construits de ses 10 doigts, sans moteur, jamais, c’est trahir, et son principal impératif est de conserver un
tirant d’eau de 30cm afin de remonter les rivières, accessoirement passer par
dessus le mur sous-marin construit par les
espagnols pour couler les navires anglais à Carthagène, mais aussi pour
remonter les platiers. Célèbre pour ça, il lui aura fallu 8 mois pour
traverser, seul, celui de Tikiau en tirant à la main et à la barre à mine son
bateau pour parcourir les 600m qui donnent sur le lagon. Il habite donc un
génialissime dériveur intégral avec quille relevable, mais non lestée. Ce qui
lui à valut son dernier naufrage (il en à eu plusieurs avec autant de milles au
compteur). Le bateau s’appelait Les Passagers du Vent, départ au lof dans le
Pacifique, le bateau s’est retourné et à commencer à se remplir doucement. 14h
passées nu, sur la coque, à voir sa peau cloquer au soleil, il s’était préparé
au grand plongeon, d’ailleurs il s’était arnaché au bateau pour être sûr d’y
rester et d’abréger l’attente… Il avait oublié dans son malheur qu’il avait
récupéré une vieille balise ARGOS rouillée sur un bateau abandonné quelques
temps plus tôt, persuadé qu’elle était HS. C’est quand l’hélicoptère et un cargo
dérouté sont arrivés à son secours qu’il a compris qu’elle avait fonctionnée.
Depuis il s’est reconstruit un dériveur plus aboutit encore,
celui que nous avons visité, plein d’astuces d’accastillage et de gréement que
l’on ne retrouve pas dans les cours des Glénans. Notamment le long tangon
permettant de gérer les deux trinquettes simultanément montées en ciseau sur le
même étai… Ou le gennaker du pauvre…
Très agréable rencontre donc, même si Lydéric est conscient
de l’émotion qu’il provoque quand il raconte ses récits, il nous à tenu en
haleine toute la journée, depuis notre rencontre le matin sur le ponton
jusqu’en fin de soirée après avoir mangé sur son bateau.
Cette rencontre à été un coup dur pour Marc puisque Céline
risque fort de ne pas partir avec lui, préférant donner suite à l’invitation de
Lydéric, ainsi partira t-elle avec « le Maitre » jusqu’à l’atoll
secret en faisant escale aux Gambiers! Nous sommes jaloux d’elle, que cet
embarquement soit une belle expérience et qu’elle nous en fasse profiter!
Je trouve qu'il n'est pas convenable de terminer un article sans y mettre d'images. Si comme moi vous ne lisez que des livres ilustrés comme Babar ou Petit Ours Brun.
Je vous propose donc quelques magnifiques plantés d'étraves piqués dans un magasine.