mardi 29 décembre 2015

Matavaa o te Fenua Enata

Matavaa o te Fenua Enata : rassemblement culturel de la Terre des Hommes, nom de cette édition 2015 du festival des arts Marquisiens.

Il nous reste un peu de temps avant le début du festival, on ne se fait pas prier pour une excursion de quelques jours à Tahuata, l’île voisine réputée pour ses petites baies inhabitées offrant des plages de sable blanc. Ronan ayant déjà réservé son billet retour pour la France avant les fêtes, c’est un peu sa dernière « escale loisir », au programme : baignade, chasse, poisson cru au lait de coco et rebaignade, rechasse, rebouffe! On en profite au maximum, grâce à un profondimètre on peut enfin mesurer nos descentes en apnée, je suis dépassé, Ronan éclate les records, là ou je peine à atteindre un petit 17m, Ronan est scotché au fond et prend le temps de quelques clichés à 18m… mon copain d’apprentissage va me manquer! Enfin, il nous reste encore du temps à passer ensemble, retour à Hiva Oa, Matavaa o te Fenua Enata!




même Deb se fait de belles apnées

le rouget armé, cible gentille




pause coco sur la plage




jolie prise : le fana. Domage, risque de
ciguatera, on ne le mangera pas...

voilà le décor à 18m

Et la surface vue du fond, on me voit là haut

Arumbaya mouille à l’exterieur du port, ce dernier est déjà rempli, deux bateaux de la marine nationale tentent de réguler les accès et les mouillages pour les plaisanciers qui affluent en gardant de la place pour les manœuvres des bateaux de délégations ainsi que pour l’Aranui 5, gros paquebot de croisière en voyage inaugural. Nous sommes brassés par la houle là ou nous nous trouvons, qu’importe notre amarinage est au point. Les ancres sont jetées très proches les unes des autres pour que chacun trouvent sa place, les rayons d’évitement sont serrés, notre voisin décide malgré tout de mouiller sur 2 ancres, tentative de courte durée, cette modification fera se rencontrer nos bateaux, heureusement aucun dégât!
Deb et moi sommes embauché quelques jours sur un chantier avec des locaux pour faire de la finition en batiment : pose de bandes de placo, peintures, pose de parquet... Super ambiance, ca fait un peu d'argent de poche pour le festival.

Lorsqu’on arrive à Hiva Oa en voilier il faut débarquer en annexe au port et parcourir environ 4 km à pied jusqu’au cœur du village. Pour peu que l’on soit chargé de quelques sacs encombrant les locaux s’arrêtent volontiers à notre hauteur pour nous embarquer dans les bennes de leurs 4x4 puis nous déposent en nous gratifiant d’un « bienvenue en terre des hommes ». C’est de cette manière que j’ai découvert le nom dialectal des îles Marquises, deux jours avant le début du festival qui allait nous mettre les sens en éveil, à la découverte des traditions de la terre des hommes.


Ronan à déjà séjourné pas mal de temps ici à Atuona lorsqu’il rejoignait Anna l’année dernière, nous faisons donc la rencontre de ses amis, en autre Julie et Julien (dit les jul’) et Vincent (personnage autant sympathique qu’énergique, la trentaine, déjà mécano hélico et avion, pilote, papa, propriétaire d’une maison géniale et en pleine création d’une station de carénage pour voiliers). Nous retrouvons aussi des amis navigateurs solitaires très chers que nous croisons depuis Taravao : Gael et Bertrand. Ajoutons à cela une joyeuse équipe de skippers et équipiers convoyant 3 catas neufs depuis les Sables d’Olonne et qui viennent juste d’arriver, l’ambiance est chaleureuse!

petit délire de coiffure à l'approche des fêtes

Bertrand s'y colle aussi sans passer par la tondeuse

 4 jours de festivités au programme, on se promet de ne pas en perdre une miette et ca commence dans l’après midi du 16 décembre, une fois passé les interminables congratulations, cadeaux et discours des officiels aux officiels, le ton est donné par le défilé des 11 délégations. Sur la pelouse du stade les couleurs des costumes des 250 danseurs (chiffres non officiels, estimation personnelle) prennent vie, les chants commencent à monter puis les pahus (tambours) se superposent, c’est parti pour 4 jours.

Les costumes sont délirant, selon les délégations on passe de la parure en feuillage à celle de plume en passant par les tapa (tissus d’écorces). Les corps quasi nus (le string végétal est de rigueur pour les messieurs) sont couverts de tatouages et de peintures, chaque extrémité du corps est ornée de colliers ou de bracelets en feuillage ou os, dents et même mâchoires de cochon. Les hommes aux pahus sont également décorés, ils frappent comme des marteaux sur ces tambours démesurément hauts, pour permettre à certain de jouer il faut monter sur des tabourets. 

les pahus
















Les danses traditionnelles sont généralement montées sur le même schéma, une meneuse chante en solo pour introduire les danseurs et danseuses qui se mettent en place sans se mélanger et entament leur chant en chœur suivit des percussions. Bien sur je ne saisi pas grand-chose du sens des paroles marquisiennes mais l’alternance est marquée comme si les hommes répondaient aux femmes, échanges ponctués par les sons de corne de brume émis par les « souffleurs de coquillages ».






C’est très difficile à décrire comme ambiance, bien sur le décor aide, on danse dans des lieux sacrés décorés de sculptures, mais les prestations n’ont rien à voir avec un banal défilé ou concert, c’est une authentique cérémonie culturelle ancrée dans les gènes. Toute l’île est présente, est fière de sa culture, de ses origines, une vraie leçon d’unité et d’identité qui à une part énorme dans le ressentit du spectateur. Souvent pendant des spectacles je me suis vu la gorge serrée et les poils dressés, je crois bien qu’on était nombreux dans ce cas là!

Deux délégations sont sorties du lot à mes yeux, celle de Ua Pou et de Nuku Hiva.
Ua Pou est manifestement une île ou le cannibalisme était courant, c’est très curieux de le découvrir à travers une danse mettant en scène l’arrivée des missionnaires puis la dégustation de ceux-ci. Chapeau bas à cette prestation appelée Kakaya : danse des cannibales.

Nuku Hiva à fait très fort également, des costumes très riches, mais surtout des chants emmenant le public assez loin au niveau émotionnel, notamment lors de la danse de l’oiseau, certainement la plus belle du festival ou quelques danseurs et danseuses choisies (Lauranne en fait partie) entament une chorégraphie au milieu des chants et des pahus en transe, représentant avec élégance des couples d’oiseaux jouant au jeu de la séduction. Impossible de vous l’imaginer sans l’avoir vu avant!!!

Ua pou : Kakaya





Nuku Hiva : la danse de l'oiseau

Laurane en oiseau





Plusieurs sites sacrés sont mis à l’honneur. Nous n’auront la chance d’en voir que 2, le troisième étant à 1h30 de piste et l’organisation ne permettant de mettre qu’un car et 5 minibus à la disposition des milliers de spectateurs, nous renonçons. Lorsque qu’un site est « ouvert » aux danses on pratique une cérémonie d’ouverture puis de fermeture, le Ha’ame’ie, marquant ainsi le puissant respect des traditions et des ancêtres. Si le site principal, le Marae d’Atuona qui malgré les gradins en pierres sculptées et les Tikis exposés tout autour, parait « grand public » avec ses lampadaires, celui de Taaoa en revanche respire profondément l’histoire. Une histoire bien préservée dans un site sacré, en pleine nature, c’est très fort.

Parallèlement à toutes ces représentations les arts traditionnels sont à l’honneur, un petit village artisanal à été monté pour exposer les sculptures sur bois, pierre, os, les perles et les graines montées en bijoux, les dessins sur tapas, les tatoueurs qui immortalisent devant le public les courbes traditionnelles sur les corps,…  On peut également gouter aux plats traditionnels car chaque délégation à préparé un gigantesque festin le temps d’un KaiKai Katahi (repas communautaire) ou l’on peut déguster  les plats cru de poissons et fruits de mer, de la raie, du requin, des légumes et des fruits en pagaille et surtout les cochons, chèvres et bœufs menés fumants au milieu des gens par des porteurs en costume, tout juste sortis du umu tao, le four marquisien ou les aliments sont cuits enterrés dans des feuilles de bananes.




sculpture sur os et dents

graines sculptées

les tapas : tissus d'écorce peints




le repas communautaire

on mange dans des assiettes en feuilles
de coco tressées

Les journées de festival vont trop vite, on en prend plein les sens, le rythme est soutenu car les représentations s’étirent dans la nuit alors que celles du matin débutent tôt. Nous enchainons les kilomètres parcourus à pied et les allers-retours au bateau. Les représentations se suivent dans la chaleur, des danses guerrières, des danses de séductions, des passages de troupes professionnelles invitées ou encore de troupe de l’île de Pâques. A chaque fois la magie opère, je suis scié de l’énergie mise en œuvre par les participants qui sont tous à la fois amateurs, danseurs, chanteurs, costumiers, organisateurs, chorégraphe, metteur en scène, maquilleurs,…

La dernière journée est organisée en mêlant les délégations dans le Marae. Comme à l’accoutumée on laisse le micro aux officiels pendant une longue heure, c’est presque plus difficile à encaisser que le soleil qui chauffe les crânes des spectateurs impuissants… c’est la règle… Puis vient le dernier tour de piste de toutes les personnes qui nous offert ce spectacle, une dernière fois la transe colorée de cœurs et de pahus à fait vibrer le public avant d’entamer la cérémonie de clôture du site, Atuona va bientôt retrouver son calme en passant le flambeau à Ua Pou pour le rendez vous dans 4 ans.
Nous avons vraiment pris un pied énorme pendant ces 4 jours, je souhaite à qui en a la chance d’y participer un jour, en espérant que ce dévouement pour le respect de la culture perdure, pour cela je fais entièrement confiance aux marquisiens. 


Une journée de repos est nécessaire, pourtant on ne parviendra pas à l’atteindre, le groupe d’amis avec qui  nous avons partagé ces derniers jours est tellement motivé que les activités fusent. On alterne entre paddle tracté, nage avec les raies Manta, pêche sous marine, pêche nocturne à la langouste en prévision des fêtes et surtout…….. l’avion. Ronan nous embarque dans cette folle aventure avec son pote Vincent, le pilote, qui nous emmène faire un petit tour dans les airs avec son coucou. Super sensations et rigolade, on ressent vraiment tous les effets de l’air dans cette petite carlingue, Ronan à eu la chance d’être assis à la place du copilote dans la répartition des poids, il aura donc le privilège de piloter quelques instants. 



Vincent



Ronan est aux commanbes

le canal du bordelais qui sépare Tahuata d'Hiva Oa



A force de virages serrés et descentes surprises
Deb commence à douter d'elle même...

Hotel Victor en approche pour la finale sur le 0-2...
charabia...

En regagnant la terre ferme on comprend que c’est à cet endroit et dans quelques heures seulement que Ronan redécollera pour de bon. Ca ne nous rend pas du tout jouasse, lui aussi est triste de quitter cette aventure mais son esprit est déjà en France au cotés d’Anna, de sa sœur et de sa famille en général. Il est partit au matin du 24 décembre, passager sur un scooter surchargé direction l’aéroport. Emouvant adieux, Bertrand venu saluer notre ami est chargé de nous consoler, il rempli ce rôle à merveille et dans l’heure qui suit nous naviguons bord à bord, lui à embarqué Julien, Julie et sa mère, de notre coté nous embarquons Pamela, collègue médecin de Julien, direction Tahuata ou nous retrouverons Gael qui mouille déjà là bas, pour 4 jours de détente, ambiance noël au soleil…


Arumbaya (gauche) et El Vadrouil' (droite)

Programme : orgie de bonne bouffe! La première journée est intégralement destinée à la pêche, diurne pour le poisson et nocturne pour la langouste. Bertrand et Gael sont des chasseurs redoutables, tenant de longues minutes en agachon (position fixe dans le décor sous marin) par 13m de fond. Plusieurs poissons dont de belles carangues et becs de cannes au menu, un vrai festin, grillé ou cru! Ajoutons à cela un peu de kayak, des apéros flottant, des journées plage (dont nous sommes les seuls occupants), pic nic à base de poisson grillé, uru, tressage d’assiettes dans des feuilles de coco, baignades intensives, rugby coco, kubb coco, pétanque coco,… 

Gael, maîtrise totale du surf tracté, beau gosse!




Julien à eu le plus gros bec de canne



Bertrand vise du gros et du bon : carangue

oursin crayon




tressage des asiettes

a table, joyeux noel!!!

  

Juile, Pamela et Deb


Kubb coco

pétanque coco


En bref noël est passé très vite, cette ressourçade à vraiment fait du bien, décidément notre rythme de vie en ce moment nous donne encore envie de continuer comme ça un bon moment! Déjà des pistes de programmes voient le jour, l’ami Bertrand est vraiment de bonne compagnie, on va surement naviguer bord à bord quelques temps encore et rejoindre l’ami Gael souvent aussi…

Avec tout ça je n’ai plus beaucoup de temps pour m’occuper de donner des nouvelles, j’espère que vous n’en tiendrez pas rigueur.


Bonnes fêtes à tous, des gros bisous des Marquises, en espérant vous y voir un jour!

PS : rappel concernant les messages sur le blog (je pense à Baptiste et Gibou), on peut pas vous répondre via la messagerie (pas d'adresse mail), vous pouvez écrire directement à tob@live.fr