mardi 26 novembre 2013

salam aleikoum



monument des explorateurs, Lisbonne 
Depuis notre départ de Lisbonne les conditions sont assez régulières, vent de nord, nord-est (froid !), navigation arrière et grand largue au génois et tangon. Seule la force du vent varie de 5 à 20 nœuds.
Nous occupons nos journées à la sieste, aux tentatives de changement de voilure (là-dessus on en revient toujours au génois avec tangon, vitesse correcte et confort à la gite et aux manœuvres), aux jeux de dés et de cartes et à la lecture. A ce sujet je dois remercier Steven et son maître menuisier de marine Francis Baton qui m’a conseillé sa bible de bord : le nouveau cours des glénans,  à mettre en toutes les mains des équipiers novices comme nous pour comprendre ce qui se passe sous, dans et au dessus du bateau !
Ah tiens je sais qu’on attend aussi de nous des résultats au sujet de la pêche ! Néant, je traine ma guigne à travers les mers malgré l’achat par Philippe à Lisbonne de lignes de haute mer spéciales daurade et thon, même une pour l’espadon… Naturellement de tels exploits de pêche seraient immédiatement relatés en une du blog… En attendant on a pris de la morue salée !
Il aura fallu attendre la deuxième nuit de cette nav, celle du samedi au dimanche, pour casser la routine. Toujours poussés par un vent de NE qui n’en fini pas de nous glacer, Deborah a appris quelques heures après moi à naviguer en regardant le ciel, notamment  en se méfiant des nuages bas, très sombres et opaques, annonciateurs de grains qu’un vent fort précède puis accompagne. Je m’étais donc laissé surprendre durant mon quart par ce grain qui m’a forcé à prendre un ris, un peu tard, le vent étant déjà passé de 15 à 40 nœuds. Aussitôt que le nuage m’eu doublé le « calme » se réinstallait comme 10 minute avant. Je fus réveillé plus tard par ce même vent forcissant et une gite sévère et insistante qui m’a tiré de mon lit pour scruter si la personne de quart était en galère. Je vis Deb avec sa frontale, un peu dépassée, la houle ayant sorti le bateau de son allure, mettant le génois à contre par 50 nœuds (ce qui a fait méchamment giter le bateau) et sollicitant tellement le pilote auto qu’il s’est mis en sécurité en plein travers de la houle… Aie, l’inclinaison du bateau progresse, aura-t-elle une limite? Je traverse tant bien que mal le carré intérieur le plus vite possible, laissant dans mon sillage Philippe en râles au sol sous un tas de coussins et d’affaires, que la gite venait d’éjecter de sa bannette. Déborah n’arrive pas à séparer le pilote de la barre pour l’isoler et la prendre manuellement, aussitôt dehors je goute à la pluie mais ce n’est rien à côté de la vague qui m’est passée dessus l’instant suivant, pendant je larguai l’écoute du génois afin de l’enrouler (ultimate pignonade à mon tour). Ce petit coup de stress à gérer dans l’urgence nous à un peu secoués, Deb en fera un article complet très bientôt! Petite frayeur, d’autant qu’une fois le génois enroulé le moteur refuse de démarrer… Raaah, encore une galère, la côte la plus proche est le détroit de Gibraltar à 200 milles à l’est… finalement le grain passe et laisse derrière lui, hormis la houle, un ciel clair qui permet de reprendre la route comme avant. On se change et se repose, Sim prend les commandes jusqu’au levé du soleil.
Dès le réveil je m’attaque au moteur avec Philippe, la panne est vite identifiée et réglée, de l’air dans le circuit de gazole. Cependant la réparation effectuée à Santander sur le tendeur de la courroie d’accessoires donne des signes alarmant, la courroie est en train de se faire manger, elle est déjà toute fine bien que neuve d’une semaine. Les poulies seraient désaxées? A surveiller!
Le soleil nous réchauffe la journée, le sondeur annonce l’eau à 20°, elle est d’un bleu magnifique et troublant, le fond est à 4500 mètres.
C’est après manger le midi, en pissant par-dessus bord que Philippe et moi la voyons. Allons, n’ayez pas l’esprit mal placé, je vous vois venir! « LA », c’est l’énorme silhouette qui fait surface à moins de 20 mètres du bateau, crachant son air avec un grand bruit de soufflet, LA baleine! Alertés par nos cris d’excitation Deb et Sim sortent sur le pont mais le cétacé à déjà replongé… Deb et moi ne lâchons pas l’affaire, tant qu’elle est dans le coin nous scrutons partout, on veut la voir et la revoir encore! Efforts récompensés, 20 minutes plus tard j’aperçois un jet de brume vertical loin derrière nous, elle est encore là! Puis enfin elle refait surface, beaucoup plus près sur tribord… Nous entamons alors sans le savoir un balai de cétacé qui durera 2 heures… On les voit venir dans la houle par leurs silhouettes aux flancs clairs et leurs dos sombres. Nous remarquons aussi qu’on peut les repérer à leurs « traces » à la surface, des trainées intermittentes de 15 mètres par 3 d’eau lisse, ce qui doit correspondre aux remous de chaque battement de queue. Les plus proches font surface à peut être 10 mètres de nous, toujours avec ce bruit de soufflerie gigantesque, une autre « surfe » la houle qui nous vient de derrière puis disparait sous le bateau… La beauté du spectacle ôte rapidement le doute sur notre vulnérabilité et leurs intentions! Nous sommes comme des enfants!  En consultant le bloc nautique qui est à bord, nous pensons fortement qu’il s’agit de rorquals communs, museau très allongé, flancs clairs, toute petite nageoire dorsale reculée,… Un seul regret cependant,  tellement scotché par le spectacle j’en ai oublié d’immortaliser ces instants. Lorsque je me suis décidé à aller chercher l’appareil photo leurs apparitions étaient déjà plus rares, sur des dizaines de prises, une seule laisse apercevoir la bête…

vous la voyez?, c'est pas évident, on zoom!
alors?
A la suite de cet épisode (ou plutôt leçon d’humilité) la routine a repris son cours. Pour couronner le tout le vent ne fait que faiblir, notre vitesse est largement réduite le confort augmenté mais le temps commence à être long à bord, besoin d’une vraie escale! Heureusement Philippe n’a pas son pareil pour se faire victime d’un gag et nous amuser. Cette nuit il a reçu une petite douche avec le contenu d’un seau dans lequel reposait une morue en train de désaler, seau qu’il venait lui-même de placer au dessus de lui dans un équilibre discutable, le temps de fouiller dans un coffre. Evidemment ça a été très payant, odeur de morue dans les cheveux et les fringues…
A tel point que le matin suivant nous sommes réveillé par Sim et Philippe en train de se mettre en maillot de bain, préparation à la baignade en haute mer, la flotte est à 20°. Nous y passons tous sauf Deb, chacun son tour à la traine, Sim sort même pour l’occasion sa planche de surf. Moi je suis complètement absorbé par la couleur de l’eau, une sorte de bleu marine – turquoise, limpide!



Le vent faibli toujours, en soirée notre vitesse chute sous les 2 nœuds, le capitaine change la courroie du moteur (qui est déjà condamnée comme la précédente puisqu’on ne peut pas la tendre suffisamment), et c’est reparti… Au petit matin le vent est inexistant, c’est une vraie mer d’huile, on voit le reflet de nos visages quand on la regarde. Hélas sa température est redescendue à 16° et sa couleur est redevenue verte. Ce qui ne m’empêche pas d’exiger une halte baignade entre deux coups de moteur, petit plongeon, seul cette fois.





































Nous commençons à prévoir la suite, l’organisation a Agadir. Philippe lors d’un précédent voyage au Maroc s’était engagé à apporter des livres (stockés dans le bateau) à l’école d’un petit village près de Tafraoute, nous devons donc faire 2 groupes. Dans un premier temps il nous propose à Deb et moi de convoyer son bateau avec Cedric (que nous ne connaissons pas encore) jusqu’à Sidi Ifni où il nous retrouverait avec Sim après avoir livré ses bouquins. L’offre est très alléchante, belle marque de confiance, seulement là nous avons surtout besoin de terre avant de reprendre le large, voilà 12 jours qu’on n’a pas fait de vraie escale. Finalement c’est Philippe qui va naviguer jusqu’à Sidi Ifnit avec Cedric, nous trois allons jouer les missionnaires pour cette livraison, on remplit nos à dos à l’approche du port d’Agadir, RDV avec le Mondrian à Sidi ou plus bas selon les envies dans quelques jours.

Programme bien ficelé, nous pouvons aborder les côtes Marocaines sereinement. En approchant ça sent la terre, odeurs prenantes, j’y retrouve celles du mouton et de la coriandre… Mais c’est peut être un peu dans la tête! Nous entrons au port au petit matin et croisons tous les petits pêcheurs qui démarrent leur journée. 



Agadir, le 20 Novembre.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire